Céréale la plus cultivée dans le monde, le blé tendre est un aliment de base qui fournit à l’Humanité 20 % de ses besoins quotidiens en calories. À l’heure où les modifications climatiques impactent de plus en plus fréquemment les récoltes et où la population mondiale continue à croître de manière exponentielle, le séquençage du génome du blé représente une avancée déterminante pour sécuriser les moissons et être en capacité de répondre à la demande alimentaire mondiale.
Comme l’explique Jean-Pierre Cohan, chef de service Valorisation des innovations génétiques chez ARVALIS-Institut du Végétal, « la connaissance du code génétique du blé, l’un des plus complexes du monde végétal, est un accélérateur de l’innovation scientifique et agronomique. Elle donne un nouvel élan aux recherches en sélection variétale qui ont pour objectif de mettre à la disposition des agriculteurs des variétés de blé de mieux en mieux adaptées à leur environnement agro-climatique et toujours plus économes en intrants. Jusqu’à présent, il nous fallait environ dix ans pour mettre au point une nouvelle variété : associée à des techniques de sélection innovantes, la cartographie du génome du blé tendre nous permettra de raccourcir significativement ce temps de recherche et d’être plus précis dans les caractéristiques ciblées. »
Plus de 107 000 gènes pour un épi
L’enjeu de cette avancée explique toute l’ampleur de la mobilisation dont le blé tendre a fait l’objet de la part du monde scientifique. Et les secrets qu’il livre ont de quoi étonner… Alors que l’ADN humain compte environ 24 000 gènes, pas moins de 107 891 gènes ont été recensés dans le blé. Ces gènes ont été localisés et organisés dans une cartographie complète du génome, soit un vaste corpus dans lequel les chercheurs vont pouvoir repérer les gènes et les portions de génome (séquences) qui sont à l’origine de fonctions intéressantes pour l’agriculture.
Cette connaissance permettra notamment de sélectionner les variétés dotées de qualités spécifiques : résistance au stress hydrique, résistance aux maladies, insectes et parasites, adaptation à chaque contexte pédoclimatique, taille des épis, profil nutritionnel des grains… Reste que pour en arriver là, le séquençage du génome ne suffit pas en lui-même : il faut désormais identifier et qualifier les fonctions de chaque gène, y compris celles qui n’ont pas d’intérêt direct pour la production agricole. « Des connaissances importantes ont déjà été acquises dans ce domaine, mais la base dont nous disposons aujourd’hui ouvre des perspectives d’une envergure considérable, conclut Jean-Pierre Cohan. Nous n’en sommes qu’au début de l’histoire… »
Sources : International Wheat Genome Sequencing Consortium (IWGSC), Science #361, 18 août 2018. Inra.fr